"Être au bout du rouleau", "À tour de rôle"
Le 14/04/2019
Connaissiez-vous l'origine des expressions "Être au bout du rouleau" et "À tour de rôle" ?
Nous utilisons généralement cette expression pour signifier que nous sommes à bout de forces physiques ou mentales.
Les mots "rouleau" et "rôle" sont issus du latin "rotulus" (venant lui-même de "rota", "roue") lequel désignait un objet cylindrique autour duquel on enroulait un papyrus ou un parchemin. Le parchemin fut l'unique support pour l'écriture utilisé durant le Moyen Âge, jusqu'à ce que le papier fasse son apparition.
Le coût de fabrication du parchemin étant relativement onéreux, dès l'arrivée du papier, on finit par ne l'utiliser que très rarement.
Documents, manuscrits et chartes étaient constitués de feuilles collées les unes au bout des autres et rédigées uniquement sur le recto ; elles étaient ensuite roulées autour d'un cylindre puis enveloppées d'un parchemin afin de les protéger et de les conserver.
Ainsi, vers la fin du XIIe siècle le "rouleau" ou "rôle" désignait tout document enroulé sur ce type de support. Ainsi, lorsque l'on avait terminé la lecture d'un document, on était "Au bout du rouleau".
Aux XIVe et XVe siècles, on disait "Être au bout de son rollet". À cette époque, le texte des acteurs de théatre était écrit sur un rôle. Lorsque celui-ci était de petite taille ou que le rôle de théâtre était peu important, on utilisait le nom de rollet. Ainsi, celui qui arrivait au bout du rollet n'avait plus rien réciter.
Le mot "rôle" demeura dans le langage courant jusqu'à la fin du XVIIe siècle, ce qui nous renvoie à l'expression "À tour de rôle".
Les rôles (ou rouleaux) de parchemin conservaient des écrits de toutes sortes : registres administratifs mais également registres maritimes ou militaires. Le militaire "s'enrôlait" dans l'Armée, le marin "s'enrôlait" dans la Marine : il s'y faisaient inscrire.
Ainsi, sur les navires, le "rôle" était ce registre d'appel contenant le nom de tous les marins marins embarqués. On appelait chacun l'un après l'autre donc "À tour de rôle" !que l'on écrivait au XVe siècle "À tour de rolle").
Mais s'il y avait des rôles, il y avait aussi des "contre-rôles" c'est-à-dire des listes falsifiées comportant des "présents" qui étaient en fait des absents (morts ou n'ayant jamais existé). Elle étaient crées par des officiers malhonnêtes dans le but de toucher la solde de ces fantômes. C'est ainsi qu'en 1292 on créa la fonction de "contreroullour" qui devint par la suite "controlleur" en 1320 et signifiant textuellement "celui qui vérifie, qui tient un registre". La fonction a perduré jusqu'à nos jours puisqu'elle porte le nom de "contrôleur".
Puis au XIXe siècle le "rouleau" a repris ses droits, matérialisé dans les banques par les rouleaux de pièces. "Être au bout de son rouleau" c'était ne plus avoir un sou.
L'apparition du phonographe pérennisa l'expression : ce dernier fonctionnant par l'intermédiaire d'un rouleau ou cylindre qui, après un ralentissement progressif arrivait en fin de course.
Du papyrus au papier
En grec ancien "papyros", puis en latin "papyrum" ou "papyrus" signifie "papier". Le papyrus est un papier obtenu par superposition de fines tranches tirées des tiges de la plante "Cyperus papyrus". Il fut probablement inventé il y a 5 000 ans.
Il était abondamment utilisé en Égypte et autour de la Méditerranée dans l'Antiquité pour la réalisation de manuscrits.
Succédant au papyrus qui fut utilisé jusqu'au VIIe siècle, le parchemin était une peau de mouton ou de chèvre apprêtée spécialement pour servir de support à l'écriture. C'était un matériau extrêmement durable. Si les papiers habituels jaunissent en quelques années, on trouve aux Archives Nationales quantité de parchemins encore parfaitement blancs, et dont l'encre est restée parfaitement noire. Aussi, il offre l'avantage d'être plus résistant et permet le pliage. Jadis, le terme parchemin s'employait également comme synonyme de diplôme.
Il fut le seul support des copistes européens au Moyen Âge jusqu'à ce que le papier apparaisse et le supplante.
D'invention chinoise, créé pendant la dynastie Han, en 105 av. J.C., le papier devint le support ordinaire de l'écriture.
La composition du papier en Chine ne comporte pas de riz mais consiste pour l'essentiel de fibres de lin, d'une certaine proportion de fibres de lin, de bambous et d'écorces de muriers qui permettent de varier les papiers à l'infini, en couleur éventuellement.
Le secret de la fabrication du papier de qualité demeurera chinois et japonais jusqu’au VIIIe siècle. Lors de la bataille de Talas (Samarkand) en 751, les Arabes, victorieux, firent prisonniers de nombreux Chinois et récupérèrent ainsi le secret du papier et de la soie. Le papier arrivera en Andalousie en 1056, puis se propagera en Occident.