Un homme fit un jour des reproches à Bayazid, le grand mystique :
- J’ai jeûné, prié, pratiqué trente jours durant, et je n’ai pas trouvé la joie dont tu parles.
"Tu peux pratiquer trois cents ans encore, et tu ne la trouveras pas" dit Bayazid.
– Mais pourquoi ?
"Parce que ta vanité fait obstacle."
– Indique-moi le remède.
"Il y a un remède, mais tu ne pourras pas le prendre."
– Dis-le-moi quand même.
"Va chez le barbier, fais-toi raser la barbe, ta barbe vénérable, enlève tous tes vêtements, ceins-toi les reins d’une corde ; puis procure-toi une musette, remplis-la de noix et suspends-la à ton cou. Va sur la place du marché, et crie : « Une noix à tout gamin qui me donnera un coup sur la nuque ! » Présente-toi ensuite au tribunal, pendant qu’il est en séance, que l’on te voie ainsi accoutré."
– Mais je ne peux pas faire ça ! Indique-moi, je te prie, un autre remède, aussi efficace.
"C’est le premier pas, le seul effort que tu dois faire. Je t’ai dit que tu en serais incapable. Tu ne peux donc être guéri."
Certains - si sincères soient-ils ou que les autres prennent pour tels - peuvent être en réalité motivés par la vanité ou l'égoïsme. À cause de cela, ils ne peuvent apprendre.
Conte soufi, extrait de "L'alchimie du bonheur" - Al-Ghazali (1058-1111,Tus - Iran)