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Expressions

"De fil en aiguille"

Par Le 05/09/2016

Connaissiez-vous l'origine de l'expression "De fil en aiguille" ?

Les Heures de Marguerite d'Orléans (vers 1430) - France

Nous utilisons cette expression pour décrire un enchaînement de propos ou d'idées se succédant les uns aux autres.

Figurant dès 1275 dans "Le Roman de la Rose" (écrit par Guillaume de Lorris et Jean de Meung), cette expression nous vient du Moyen-Âge, époque où les familles comptaient toutes au moins une couturière parmi leurs membres. Très souvent, les femmes aimaient à coudre ou broder en groupe, tout en discutant. À l'instar du fil qui passait dans le chas de l'aiguille, leur conversation passait d’un sujet à un autre selon une certaine logique et dans la continuité. Elles entretenaient ainsi des relations sociales.

Un peu d'histoire
La naissance de la couture remonte au Paléolithique Supérieur, grâce à l'invention de l’aiguille à chas permettant d’assembler les pièces de vêtement coupées. Les peaux et fourrures sont alors les seuls matériaux dont disposent l
Aiguille en os (17 000 ans), Gourdan - Francees hommes pour se vêtir ou créer des abris.
La plus ancienne aiguille à chas au monde est datée de plus de 45 000 ans ; elle a été découverte dans la grotte de Denisova (Russie). Elle pourrait avoir été faite par des Denisoviens. Réalisée dans un os d'oiseau, elle mesure 7,6 cm.
Les aiguilles sont d’abord fabriquées en ivoire de mammouth, en os de renne ou en défense de morse. Certaines sont déjà très fines.
Les Inuits, par exemple, utilisaient le tendon du caribou en guise d'aiguille à tricoter ; les peuples indigènes des plaines américaines utilisaient des méthodes de coutures sophistiquées pour assembler les tipis.
En Afrique, la couture s'est associée au tissage des feuilles permettant de créer des paniers.
L'assemblage de vêtements à base de fibres naturelles provient du Moyen-Orient aux alentours de 4000 ans av. J-C., voire plus tôt durant l'Ère Néolithique.

Au Moyen-Âge, la plupart des femmes françaises apprennent à filer, tisser, coudre et broder. Ce sont souvent les mères qui enseignent la couture à leurs filles.Ciseaux et des épingles du Moyen-Age
La société médiévale fait preuve d'une aversion pour les mélanges de couleurs, opérations jugées infernales car elles enfreignent l’ordre et la nature des choses. On ne mélange pas les couleurs, on juxtapose, on superpose. Le bariolage sur un tissu est la marque de la souillure, marque infâmante.
Certaines catégories sociales sont identifiables par les couleurs (seules ou en combinaison) de leurs vêtements, qui leurs sont imposées par des règlements et des statuts sous formes (croix, rouelle, bande, écharpe, ruban, bonnet, gants, chaperon). Ainsi, succinctement et à titre d'exemple, en France :

- blanc et noir : seuls ou en association désignent les misérables et les infirmes (lépreux)
- rouge :les bourreaux et les prostituées
- jaune : les faussaires, les hérétiques et les personnes de confession israélite.
- vert seul ou jaune et vert : musiciens, jongleurs, bouffons, fous.

Le Roman de la Rose
Il s'agit d'une œuvre résumant toute l'aventure de la courtoisie et réunissant sous un même titre deux fictions
Pierre de Crescens  (1470), París.jpgallégoriques, composées à intervalle de quarante ans par deux poètes de tempéraments opposés : Guillaume de Lorris et Jean de Meung.
Dans la première partie écrite vers 1230 par Guillaume de Lorris, le verger ou jardin paradisiaque est un lieu désarmé, où les chevaliers brillent par autre chose que leur force physique et leurs qualités guerrières ; la véritable distinction réside dans le raffinement des manières. L'allégorie de Guillaume de Lorris résume le postulat de base de la courtoisie : elle exalte la force du désir, mais elle refuse la jouissance ultime qui le comblerait et le détruirait en même temps.
La seconde partie, composée entre 1264 et 1269 par Jean de Meung, est avant tout une satire : l'auteur s'en prend aux ordres monastiques,
Le Roman de la Rose traduit en anglais par Geoffrey Chaucer,(1440).jpg prédicateurs et mendiants, et surtout aux religieux hypocrites qui n'ont de religieux que l'habit, au célibat des clercs ordonnés, à la noblesse, au Saint-Siège, aux prétentions excessives de la royauté, mais surtout aux femmes. La raison y prend le pas sur l'amour.

Au long du XIIIe siècle, la courtoisie a connu une évolution, tout en poursuivant un même but profond : domestiquer le mythe de la passion fatale de Tristan et Yseult.

Le mot "roman" est issu du latin populaire "romacium" formé à partir de l’adverbe "romanice" qui signifie "en langue romaine vulgaire" (comprenant les langues romanes dont l'ancien français, "oil", "oc" et "si") parlées par la population des pays conquis Dés à coudre romains en bronze (Ier siècle)par Rome, par opposition au latin pratiqué par les lettrés.
Le roman désigne donc une œuvre en langage populaire.
C'est aux alentours de 1135 que les auteurs commencent à désigner leurs oeuvres narratives sous le nom de "roman". Bien que novateur et original, le roman puise de nombreux motifs dans les genres littéraires qui l'ont précédé. Il est novateur car il mêle les exploits guerriers de la chanson de geste, la vision amoureuse de la poésie lyrique et puise dans les légendes celtiques.
Enluminure (XIVe siècle) extraite du Roman de la Rose.jpg  
Dans la littérature française, l'inventeur du roman médiéval est Chrétien de Troyes (1130 - 1180 ou 90). Auteur de cinq romans traitant de la quête arthurienne et de la Table Ronde (il mourut avant de terminer le dernier intitulé le "Conte du Graal") rédigés en vers octosyllabiques et en langue d'oil, .

Le terme de langue "d'oil", langue "d'oc" et de langue de "si" fut créé par Dante dans son ouvrage "De vulgari eloquentia" en 1303-1304 : il Dés à coudre en laiton et en cuivre (XIIe - XVIe siècles)distingue trois langues romanes selon leur manière de dire "oui" :
- la langue d’oc (lingua d’oco) parlée au sud de la Loire
- la langue d’oïl (qui donnera le français) parlée au nord de la Loire ; le "oui" du français moderne est issu de "oïl"
- la langue de si (qui donnera l’italien).

Jusqu'au XIIe siècle, exception faite des écrits religieux et juridiques, les textes étaient rédigés en vers octosyllabiques.

Les Très Riches Heures du Duc de Berry (vers 1440)

"Échec et mat"

Par Le 14/12/2014

Connaissiez-vous l'origine de l'expression "Échec et mat" ?

Jeune persan jouant aux échecs (livre de Jâmi)

Cette expression est issue du persan "Esh-shah mat", c'est-à-dire "le roi est mort". Cependant, il y aurait eu une confusion entre le persan mata "mort" et le persan mat "étonné, paralysé". Shah mat signifierait alors plutôt "le roi est sans défense". Cette dernière étymologie correspondrait mieux au jeu, puisque le roi est la seule pièce à ne pas être "tuée" sur l'échiquier, mais à se rendre (le joueur couche la pièce) lorsque la partie est perdue.
ÉchiquierC'est vers le VIIIe siècle que les Perses introduisent le concept de cette annonce de menace sur le roi adverse. Les règles sont ensuite modifiées pour interdire que le roi soit offert à la capture ou laissé sous la menace, considérant que la victoire par échec et mat était plus élégante ; la victoire par annihilation des défenses adverses tomba en désuétude. Le roi ne pouvait plus être capturé et la partie était finie dès qu'un joueur dont le roi menacé n'avait plus de coup possible, c'est-à-dire qu'il est en échec et mat.

Un peu d'histoire
La théorie dominante, attribue la naissance des échecs à l’Inde du Nord, vers l’an 500. Ils se seraient d’abord diffusés en Asie centrale, puis en Chine, suivant la route empruntée par le bouddhisme. Cette hypothèse conserve toute sa crédibilité et sa vraisemblance, mais elle souffre à tout expliquer. En effet, la majorité des traces historiques connues à ce jour incline plutôt à placer la naissance des échecs en AsiePièces d'échec en pierre, VI - VIIIe siècle - Afghanistan Centrale, entre Iran oriental, Afghanistan, Pakistan, Ouzbékistan, Tadjikistan, Turkménistan, Kirghizistan, Turkestan oriental, bref, tous ces pays qui, à cette époque reculée, se rattachaient à l’Empire sassanide ou, tout au moins, se trouvaient habités par des peuples parlant majoritairement des langues iraniennes.
Les recherches n'ont pas permis - à ce jour - d'amener des éléments concrets comparables pour l'Inde. Mais il reste une sérieuse objection : plusieurs Xiangqi, le char (ou la tour)caractéristiques des échecs chinois, le "xiangqi", paraissent plus primitives que celles des échecs primitifs indo-persans (chatrang, chaturanga). L’exploitation des sources archéologiques et le déchiffrement des textes anciens sont loin d’être achevés en Chine, et des découvertes ultérieures balaieront peut-être les réponses établies aujourd’hui. Qui plus est, l’énigme obéit peut-être à un schéma plus complexe d’influences multiples et superposées entre les civilisations et leurs jeux.

Les plus anciennes pièces d’échecs connues sont les sept qui ont été trouvées en 1977 à Afrasiab, près de Samarkand en Ouzbékistan. Pièces d'échec, ivoire - Samarkand, VIe-VIIIe siècleIl s’agit de petites figurines en ivoire, hautes de 3 à 4 cm : deux soldats à pied portant une épée et un bouclier, un cavalier pareillement armé, un éléphant monté et un homme chevauchant une sorte de fauve, deux chariots très différents l’un de l’autre, l’un étant probablement "royal". Ces pièces furent datées du VIIIe siècle, d'évidence avant 712 à cause de la présence d’une pièce de monnaie dans la même couche des fouilles. La première mention écrite des échecs, date du début du VIIe siècle, et nous Char-éléphant, ivoire - Samarkand, VIIe-VIIIe sièclevient de la Perse. Le jeu d'échecs (en persan "Chatrang" ou "Shatranj") entre dans l’Histoire au cœur de l’Iran médiéval, en opposant déjà deux armées de seize pièces.Trois textes rédigés en pehlevi (moyen persan) montrent que les échecs étaient connus dès l’an 600 en Perse, arrivés à la cour des empereurs Sassanides avec la délégation diplomatique d'un roi de l'Hind (Sind actuel, sur les berges de l'Indus).

Au XIe siècle, en Inde, apparaît une variante du jeu d’échecs à quatre joueurs et à l’aide de dés (le chaturajî). Ce jeu serait progressivement devenu un jeu à deux, principalement à cause de la difficulté à réunir quatre protagonistes. Les Européens ont continué d’utiliser les dés pour choisir leurs coups aux échecs standards jusqu’au XIIIe siècle au moins.
Lorsque les Arabes envahissent la Perse, ils adoptent le "chatrang" sous le nom de "shatranj". Les échecs connaissent alors un développement remarquable. C’est au cours des IXe et Xe siècles qu’apparaissent les premiers champions et les premiers traités. Les pièces sont stylisées en raison de l’interdiction de représenter des êtres animés. 
L’arrivée des échecs en EuropeLe jeu de Charlemagne, 1080-1090, Salerne - Italie se fait sans doute par l’Espagne musulmane aux alentours du Xe siècle, ou par l’Italie du sud (Sicile), se diffusant dans toute l'Europe à partir du XIe siècle. 
L’échiquier s'occidentalise au milieu du XIIe siècle, les pièces devenant plus mobiles probablement en lien avec le développement de la poudre à canon qui rend l'artillerie des champs de bataille plus puissante :

- Le plateau devient bicolore avec les cases rouges et noires (qui deviendront plus tard blanches et noires) ; et du persan au français, en passant par l'arabe,

Miniature de l'ouvrage de Jacques de Cessoles (1300)- Le Shah devient "Roi"

- le Vizir (en persan "farzin") devient "fierge" (ou vierge), puis reine et/ou dame ;

- l'Éléphant (en persan "pil") - "al fil" en arabe, demeuré alfil en espagnol - devient "aufin", puis "fou" (bishop : évêque en anglais) ;

- la Tour ("rukh" qui signifie aussi "bateau" en sanscrit) devient "roc" (d'où le verbe "roquer" en français), puis "tour" vers la fin du XIIe siècle :

- le Cheval (Asp), identique au cavalier moderne ;

- le Piéton (Piyadah), qui devient "paon" puis "pion".

 

N.B. Les éléphants accompagnaient toujours la marche des troupes perses. Ces animaux faisaient office de tours d’assaut mobiles causant la panique dans les rangs ennemis. C'est la plus puissante pièce du jeu indien, le char de guerre, corps d'armée spectaculaire grâce auquel les Aryens – ancêtres communs aux Indo-Européens – conquirent la vallée de l'Indus au IIe millénaire avant notre ère.

Le Jeu d'échecs (1555) - Anguissola Sofonisba,1531 - 1626)

"Avoir du talent"

Par Le 01/12/2014

Connaissiez-vous l'origine de l'expression "Avoir du talent" ?

Vincent Van Gogh, 30 mars 1853-  29 juil 1890-  autoportrait

Avoir du talent signifie "être doué" pour quelque chose en particulier.

À l'origine, le talent - du latin "talentum", issu du grec ancien "talanton" (l'étalon) - est une unité monétaire utilisée à l'époque de la Grande-Grèce et jusque sous l'Empire romain.

BibleL’influence des Textes Sacrés, notamment de l’Evangile, dans l’évolution des langues occidentales a été très importante. L’histoire du mot "talent" en est un bon exemple. Dans la "Parabole des talents" (Matthieu 25, 14-30), le talent représente une somme d’argent. La traduction de la Bible en français au XVIe siècle et l’étude du texte dans les milieux protestants font connaître cette parabole.
À partir du début du XVIIe siècle, dans les commentaires et les sermons, ce sens concret a figuré les "dons confiés par Dieu". 
Niccolo Paganini Gènes 27 oct 1782 - Nice 27 mai 1840Talent prit alors le sens de "capacité, habileté, supériorité dans un art, un métier", ce qui éclipsa la précédente signification.

Talent, talen ou talan.
Il existe souvent des mots dont l'assonance et l'homonymie sont parfois trompeuses.
Dans les régions où l'on parle des langues gallo-romanes, et en particulier dans les zones où les langues littéraires ont eu moins d’influence, le sens abstrait de certains mots définissant un état d’esprit, ou une intention a évolué vers un sens de plus en plus concret.
En occitan par exemple, le cheminement du mot "talent" a rejoint à la notion de "désir, d'envie", qui existe encore en Provence, jusqu'à signifier "désir de manger, faim" en Languedoc, en Gascogne et en Wallonie.

Gérard Philip, Cannes 4 déc. 1922 - Paris 25 nov. 1959L’expression occitane "avé talent" ne signifie donc pas obligatoirement "avoir du talent" au sens "être doué".
Le "talent" occitan et le "talent" français ont la même origine mais ils sont le résultat de cette évolution différente.
Le "talent" français est récent et littéraire, il date du XVIe siècle, alors que le "talen(t)" occitan est beaucoup plus ancien, comme dans "passa talent" (souffrir de faim).
"Lou pan à la dènt fa veni la talènt" (le pain à la dent fait venir l’envie de manger).

N.B. Au Québec, le mot "talent" a conservé son sens originel et "Ne pas avoir de talent" signifie "Avoir du mal à gérer son argent ou à en gagner."

Un peu d'histoire
A l'origine les hommes pratiquaient le troc, c'est-à-dire qu'ils échangeaient entre eux les produits de la terre ou de la mer contre les produits dont ils avaient besoin.
Le troc, qui est en fait un paiement en nature, devait se révéler au cours des siècles peu pratique compte tenu de l'accroissement des échanges commerciaux entre les Cités Etats, car s'il est facile d'échanger un bœuf contre un boisseau de blé, il est beaucoup plus délicat de troquer un troupeau entier contre mille boisseaux de blé.
Lingot de cuivre (talent) IIe millénaire av. J.C. 70 80 cmOn imagina alors la création d'un étalon d'échange, le "talanton" utilisable en tous lieux : c'est ainsi que fut créé le "talent".
L'apparition des talents ou "lingots à peau de bœuf" coïncide avec le début du commerce du cuivre dans le bassin méditerranéen (environ 1600 avant J.C).
Les premiers lingots découverts proviennent de la Crète.
Le talent était en bronze coulé en forme de peau de bœuf et représentait une valeur marchande. Exemple : 1 talent = 10 bœufs = 10 boisseaux de blé.
Il pesait environ 25 à 29 kg, ce qui s'avéra bientôt peu pratique compte tenu des poids à véhiculer. Certains archéologues émettent l'idée que leur forme particulière permettait probablement une prise manuelle aisée, ce qui serait l'indice d'un commerce facile et légitime. D'autres pensent qu'ils étaient destinés à être transformés plutôt qu'à être conservés comme biens de prestige.

On imagina alors l'invention d'une véritable monnaie métallique qui puisse circuler facilement entre les nations et dont la valeur serait garantie par l'état émetteur.
1 3 de state re en electrum 650 610 avant j cLe Statère valait deux Drachmes, la Drachme était divisée en six Oboles. Le métal utilisé était l'argent, l'electrum et l'or. Pour fabriquer des pièces durables, on ajoutait un peu de cuivre, (afin d'en maintenir l'aloi).
Au-delà de ces subdivisions, il existait des unités de compte : la Mine (100 drachmes) et le Talent (6000 drachmes). Te tradrachmeLe talent avait un poids légal de 60 mines, soit 25,86 kg d'argent. Ce poids variait selon les pays où il était en usage.

A titre d'exemple, aux temps des diadoques (les généraux qui se disputèrent l'empire d'Alexandre le Grand à sa mort en 323 av. J.-C.), une drachme valait une journée de travail qualifié.

 

Charles baudelaire paris 9 avril 1821 31 aou t 1867

"Prendre son pied"

Par Le 23/11/2014

Connaissiez-vous l'origine de l'expression "Prendre son pied" ?

Pied gauche fragment de statue datation inconnue
L’expression aurait son origine dans l’argot des pirates et corsaires. Prendre son pied, c’est partager le butin mesuré à l’aide du pied, l’unité de mesure, d’où le sens de plaisir partagé.

Le pied est une unité de longueur qui existait depuis l'Antiquité, il est attesté depuis le début du IIIe millénaire av. J.-C.. Correspondant à la longueur d'un pied humain, c'est-à-dire un peu plus de trente centimètres. Le pied égyptien équivalait à 30.5112 cm
Sous l'Ancien Régime, on le nommait "pied de roi" et valait 12 pouces soit 32,5 cm.

Saint-Malo FranceLes pirates pratiquaient le banditisme. Lors du partage de la prise entre les membres de l'équipage, des piles d’or de la hauteur d'un pied étaient distribuées à chacun en fonction de la hiérarchie, "prendre son pied" signifiant alors "prendre sa part de butin".
Le mot "pirate" provient du terme grec "peiratês", lui-même dérivé du verbe "peiraô" signifiant "s'efforcer de, essayer de, tenter sa chance à l'aventure".
Le mot "corsaire" a été emprunté à l'italien "corsaro" lui même dérivé du latin "cursus", "course". Il est attesté du XVe siècle, mais le terme de "pirate" était encore utilisé comme synonyme à la fin du Moyen Âge, d'où la confusion entre les deux acceptions.
Un corsaire est un membre de Jean Bart (1650 - 1702), corsaire dunkerquoisl'équipage d'un navire civil armé, autorisé par une lettre de marque (également appelée" lettre de commission" ou "lettre de course") à attaquer en temps de guerre, tout navire battant pavillon d'États ennemis, et particulièrement son trafic marchand, laissant à la flotte de guerre le soin de s'attaquer aux objectifs militaires. Les corsaires ne doivent donc pas être confondus avec les pirates puisqu'ils exercent leur activité selon les lois de la guerre, uniquement en temps de guerre et avec l'autorisation de leur gouvernement. Ce sont des civils qui combattent d'une façon indépendante avec un statut équivalent aux militaires mais sans être soumis à l'autorité d'un état-major, tout en obéissant aux lois de la guerre.
Un "équipage de prise" était envoyé sur le navire saisi avec mission : le ramener à bon port pour le revendre avec sa cargaison, débarquer les prisonniers, entrer en contact avec l'armateur et lui proposer leur libération contre rançon ou par échange avec un nombre équivalent de prisonniers.

Ces missions étaient très réglementées :

La Rochelle - FranceLorsque les corsaires rentraient au port avec les marchandises et richesses volées "légalement" sur les mers, le capitaine corsaire déposait à l'Amirauté son rapport de mer dont l'examen par les officiers d'administration déclenchait une procédure de plusieurs jours.
Personne n'avait le droit de descendre à terre avant que les officiers d'administration n'aient dressé le procès verbal d'inspection du navire, vérifié que les scellés apposés par l'écrivain de bord sur les coffres, malles et armoires de la prise soient intacts.
Ensuite ils apposaient leur sceau sur les écoutilles pour éviter que des parties du butin de prise ne soient débarquées à la nuit tombée.
Enfin, ils interrogeaient les prisonniers et les menaient vers les prisons de la ville.
Alors seulement, l'équipage pouvait quitter le navire et attendait le verdict du Tribunal des Prises, nécessaire avant la vente aux enchères du butin de prise.
Le produit de la vente aux
Dieppe, Normandie - Franceenchères des prises était alors partagé entre les personnes ayant collaboré à la capture de l'ennemi dans l'ordre des priorités :
L'État (Roi, République, Empereur) prenait entre 10 et 20 pour cent (c'est lui qui fournissait la lettre de marque).
Les frais (on payait la nourriture, la poudre, les munitions, ainsi que les réparations faites durant le voyage).
Les veuves et les blessés (les veuves prenaient deux fois la part de leurs défunts maris, et les blessés avaient une indemnité, fixée au départ en fonction de la partie du corps manquante, en plus de leur part).
L'armateur (ou le groupement d'armateurs, lorsque les frais d'armement étaient importants) prenait ensuite 30 pour cent du reste.
Enfin, chaque homme avait sa part en fonction de sa place dans l'équipage (le mousse=demi-part, le capitaine=25 parts, le chirurgien=25 parts etc…)

Saint-Malo, Bretagne - FranceÀ partir du XVIIIe siècle, l'État se contente de droits d'enregistrement réduits afin d'encourager la prise de risque des armateurs. Le partage des prises devient alors : 2/3 pour l'armateur, 1/3 pour l'équipage
C'est en 1793, durant la Terreur, que la Convention montagnarde vota l'abolition du pied en France.
Durant le dix-neuvième siècle, presque tous les pays européens abandonnèrent successivement leurs pieds respectifs au profit du système métrique décimal. Cette unité est néanmoins encore utilisée dans beaucoup de pays anglo-saxons et d'anciennes colonies de l'empire britannique.

Les corsaires les plus célèbres :

Jeanne de Belleville (1300-1350), dite Dunkerque, les dunes du Nord - France"La Tigresse bretonne ou La Lionne de Clisson ou La Lionne sanglante".
Jean Fleury (ou Florin), mort en 1527, corsaire dieppois. Il est connu pour avoir volé en 1522, le somptueux trésor de Guatimozin, dernier empereur aztèque, que Cortès envoyait du Mexique entassé dans deux caravelles.
Guillaume Allène, La Rochelle (1563-1583) dit "le capitaine provençal"
Jean Bart (1650 - 1702) corsaire dunkerquois
René Duguay-Trouin (1673 -1736), corsaire malouin.
Robert Surcouf (1773 -1827), corsaire malouin.

Robert Surcouf (1773 -1827), corsaire malouin

 

"Le jeu n'en vaut pas la chandelle"

Par Le 27/10/2014

Connaissiez-vous l'origine de l'expression : "Le jeu n'en vaut pas la chandelle" ?

Joueurs de cartes -  Wolfgang Heimbach 1615–1678Cette expression remonte au XVIe siècle.
Lorsque nous disons "le jeu n'en vaut pas la chandelle", il est rare de nos jours que cela ait un rapport direct avec un jeu quelconque. Cette expression signifie généralement que l'enjeu ou le résultat d'une situation, la qualité ou la valeur d'un objet ne seront pas à la hauteur des efforts ou des dépenses qu'ils engageront.

Les salles où l'on jouait à toutes sortes de jeux (cartes, dés etc...) particulièrement ceux donnant lieu à des enjeux, étaient éclairés à la chandelle. Celle-ci était considérée comme un objet de luxe.
ChandelleDans les endroits modestes, l'usage voulait qu'en partant, les participants laissent quelque argent sous le chandelier pour dédommager du coût de cet éclairage.
D'une part, lorsque leurs gains étaient faibles ou nuls, les joueurs en étaient pour leurs frais.
D'autre part, lorsque les organisateurs constataient que ce qui se trouvait sous le chandelier était inférieur aux avances pécuniaires qu'ils avaient engagées, ils concluaient que le jeu n’en valait pas la chandelle.

Notons que jusqu'au XVIIIe siècle, les théâtres, suivant leur importance, étaient chaque soir éclairés par d'innombrables chandelles.
À l'époque, la dépense était exorbitante.
Si la représentation était de mauvaise qualité ou si le public avait été peu nombreux, les bénéfices rapportés étaient insuffisants et ne couvraient même pas le prix des chandelles.

Un peu d'histoire
Le mot "chandelle" est uniquement attribué aux luminaires faits de suif. La mèche était Médecin examinant l'urine - Trophime Bigot (1579–1650)en étoupe (chanvre ou lin) ; ce n'est que beaucoup plus tard qu'elle fut en coton.
Durant des siècles, le jonc a été utilisé pour faire des chandelles. Fendu avec précaution pour ne pas en abimer la moelle, il était trempé dans de la graisse végétale ou du (suif graisse fondue de mouton ou de bœuf) qu'on laissait ensuite durcir. On le faisait brûler dans des brûle-joncs. Dans certaines régions, le suif était remplacé par de la résine.
En Occident, à partir du Moyen Âge la chandelle rivalise avec la lampe à huile.
La chandelle était plus pratique sans être excessivement chère (mais elle était taxée et l'huile restait plus économique). Moins de liquide qui se renverse, de flamme à ajuster, de réservoir à remplir. Mais le suif coule et graisse les doigts, la flamme demeure jaune. Contrairement à la bougie, plus chère, la chandelle brûlait en émettant une odeur forte et une fumée noire.

Bejaia (Bougie) à l'époque hammadite - AlgérieLe mot "bougie" n'est apparu dans la langue française qu'au XIVe siècle, et est exclusivement réservé à un luminaire fait de cire d'abeille. Il vient de l'arabe "Bugaya", nom d'une ville d'Algérie (actuellement Béjaia ou "Bougie" en français) où se faisait au Moyen-Âge le commerce de cire et de bougies. Connue en Europe pour la qualité de ses chandelles faites de cire d'abeille auxquelles elle a donné son nom, elle fournissait une grande quantité de cire qui pouvait remplacer le suif des chandelles. 

Mais cierges et bougies de cire étaient très onéreux ; seuls la noblesse et le clergé s'éclairaient avec des cierges en cire d'abeille, le peuple français s'éclairant au suif faute de moyens. À titre d'exemple, sous le règne de Louis XIV, le coût d'une bougie équivalait au salaire journalier d'un ouvrier spécialisé. Son utilisation était donc réservée aux plus hautes sphères de la société et notamment à la Royauté.

C'est au milieu du XIXe siècle que la mèche de coton tressé remplaça la mèche de chanvre ou de lin.

La Porte Fouka, Béjaïa - Algérie

"Chacun voit midi à sa porte"

Par Le 09/10/2014

Connaissiez-vous l'origine de l'expression "Chacun voit midi à sa porte" ?

Cadran solaire de la cathe drale de chartres 1528
Autrement dit : chacun se préoccupe de son propre intérêt avant toute autre chose, et considère ses problèmes ou ses opinions comme étant les plus importants."
Cette expression est directement liée à la fabrication des cadrans solaires scellés au-dessus ou à proximité de la porte d'entrée des maisons, et dont l'usage se généralise en Occident dès la fin du Moyen Âge.Cadran solaire de Landevant, Bretagne - France
À l'origine, c'étaient de simples maçons sans connaissance gnomonique (gnomon signifie "règle" en grec) qui faisaient office de "cadraniers". Or, pour créer des cadrans solaires précis, il fallait non seulement des connaissances gnomoniques, mais trigonométriques et cosmographiques pointues. Cette spécialité était le fait d’un métier précis : celui des cadraniers.
Il était même attendu de ces artisans qu’ils soient capables de pratiquer ce métier véritablement comme un art, dans l’utilisation de la céramique, de la poterie,du verre, ou de la peinture. Le cadranier doit être chaudronnier, graveur sur pierre. Le cadran dépasse l’objet fonctionnel et devient une œuvre, favorisant le développement de certains métiers, notamment au travers du compagnonnage.
Mais faute de ces compétences, ces derniers n’étant pas toujours réalisés par des cadraniers avertis, il était fréquent que les habitants aient des indications d’heures différentes d’une maison à l’autre. Ainsi, quand le soleil était au zénith, les cadrans de chaque porte n’indiquaient pas tous midi. D'où l'expression : "Chacun voit midi à sa porte".
Une devise ou un proverbe orne souvent le cadran. Elle peut être en latin : "Carpe diem" (Cueille le jour présent)
ou "Vulnerant omnes, ultima necat" (Toutes les heures blessent, la dernière heure tue),
"Horas non numero, niai serenas" (Je ne compte que les heures sereines), "Dies nostri quasi umbra super terram et nulla est mora" (Nos jours sur la terre sont comme l'ombre, et il n'y a point d'espérance) etc.

Un peu d'histoire.
Gnomon de Knowth - Irlande 5300 ansL'ancêtre du cadran solaire était le "gnomon".
Le mot gnomon est un mot qui en latin signifie "aiguille de cadran solaire", venant du grec gnômôn qui désignait une règle ou ce qui sert de règle.
Par dérivation un gnomon est le nom du plus simple cadran solaire : un bâton planté verticalement dans le sol ; voire encore plus simple : l'homme lui-même. Sa table est horizontale. Un des cadrans solaires les plus anciens retrouvés à ce jour vient d'Egypte. On estime son age à environ 3600 ans. Un autre, gravé sur pierre, a été retrouvé en Irlande sur le site de Knowth '(Great Mound), il aurait été construit il y a 5300 ans.

Le gnomon a donné son nom à la science des cadrans solaires, la gnomonique, ainsi qu'à la personne qui conçoit des cadrans, le gnomoniste. Le réalisateur est appelé cadranier.

Plus tard, un nouveau modèle (le scaphé), basé sur la sphère, fut introduit par Bérose en Grèce au IIIe siècle av. J.-C.. D'autres modèles en découlèrent (hémisphérique, conique, plan…).Cadran solaire romain (scaphé), Ier - IIe s
Ces modèles indiquaient des "heures inégales" (heures également appelées temporaires variant selon le lieu et la saison) qui divisaient le jour, du lever au coucher du soleil, en 12 heures, été comme hiver : les heures d'été étaient longues, les heures d'hiver courtes.

En Égypte antique, les jours et les nuits étaient divisés chacun en douze heures, et ce quelle que soit la durée du jour ou de la nuit. Les Égyptiens mirent au point un instrument capable de mesurer les heures du jour : le cadran solaire.

Bien sûr, un cadran solaire ne fonctionne pas quand le soleil n'est pas visible ni quand le temps est couvert.
Clepsydre égyptienneTrès tôt, presque toutes les civilisations ont développé des instruments qui pouvaient alors prendre le relais du cadran solaire, en particulier la clepsydre (littéralement "qui vole l'eau") ou "horloge à eau.
Elle semble avoir été inventée en Egypte environ 3.000 ans avant J.C.. Elle fonctionnait sur le principe d'un écoulement régulier au fil du temps, sur le même principe que le sablier.

Partant d'Egypte, les clepsydres se sont répandues chez les Grecs, puis chez les Romains. Ce type de clepsydre à remplissage unique offrait une précision de l'ordre de 5 à 10 minutes. Le principe de la clepsydre a également été utilisé par les Amérindiens. Les clepsydres les plus perfectionnées ont été celles réalisées par les Perses et les Chinois.

La clepsydre fut utilisée pour mesurer de courtes périodes : en Grèce pour mesurer la durée d’un discours ou d’une plaidoirie dans les
Clepsydre, Amphiareion d'Oropos - Grèce tribunaux ; puis les durées des gardes dans la légion romaine. L'heure était indiquée par le niveau d'un flotteur .

Notre division moderne du temps remonte au début du IIe millénaire avant J.C.. Les Mésopotamiens ont compté en base 60, comme le faisaient les Sumériens. Le système de numération babylonien était sexagésimal. La division de l'heure et des minutes a repris ce système. Ainsi, l'heure est divisée en 60 minutes et la minute en 60 secondes.

 

 

Clepsydre grecque en terre cuite du Ve siècle avant J.C.

 

Cadran solaire - Qumran Ier - IIème siècle apre s j c

 

"Mettre les points sur les "i" "

Par Le 04/10/2014

Connaissiez-vous l'origine de l'expression "Mettre les points sur les "i" " ?

 

Aujourd'hui, l'expression "mettre les points sur les "i", signifie clarifier les choses, ainsi que le firent les moines copistes.

Du XIe au XIIe siècle, caractères en gothique Son origine remonte à l’époque où l’on adopta le caractère minuscule gothique "primitif" (XIe siècle).
Au Moyen-Âge, faute de quantité de papier suffisante (le parchemin coûtait très cher),
l'écriture gothique des moines copistes était serrée et abrégée.XIIe siècle, Antiphonaire ; caractères en gothique
Ainsi, la lettre "i", qui n'était alors constituée que d'une seule barre verticale : "l", pouvait aisément se confondre avec d'autres lettres. Les textes étant la plupart du temps rédigés en latin, deux "i" se confondaient quelquefois avec "u" ; on les distingua alors par des accents tirés de gauche à droite.

Début du XIIIe siècle, caractères en gothique Les accents devinrent des points au commencement du XVIe siècle. Ce dernier changement, adopté d’abord par quelques copistes, parut vétilleux à quelques autres, mais dans un souci de clarté, les moines prirent l'habitude d'apposer une marque sur les "i" afin de les reconnaître : ce fut un point au-dessus de la lettre.XIVe siècle, psautier ; caractères en gothique

Et de là vint la locution "mettre les points sur les "i", que l'on applique à une personne qui pousse l’exactitude jusqu’à la minutie.

Cette pratique fut ensuite élargie à la lettre "j".

Graphie carolineN.B. L’écriture gothique est une déformation de la "minuscule caroline" (époque carolingienne, VIIIe siècle) et qui déclina lentement, pour laisser la place, au XIIIe siècle, à l’écriture gothique, plus anguleuse. 

Le latin ayant été la langue internationale, diplomatique, scientifique, philosophique et commerciale européenne (jusqu'au XVIIIe siècle), on inventa la lettre "j" qui remplaça le "ii" de certains mots. Elle était transcrite comme une sorte de "i cédille". Elle fut d'abord utilisée dans les documents commerciaux et les contrats, afin d'éviter la fraude lorsque l'on écrivait des nombres tels que "VI" ou "VIII" denarii ; d’où "VJ". L'usage s'en est ensuite généralisé.

XIVe - XVIe siècle, Le Cantique des Cantiques ; gothique

 

 

"En espèces sonnantes et trébuchantes"

Par Le 04/10/2014

Connaissiez-vous l'origine de l'expression "Payer en espèces sonnantes et trébuchantes" ?

Le pre teur et sa femme 1514 quentin metsys
C'est à partir du XVIe siècle que cette expression est entrée en usage. Elle désigne d'une manière plaisante les bonnes vraies pièces de monnaie.
Demander à être payé en espèces sonnantes et trébuchantes signifiait que l'on voulait être payé en monnaie authentique et neuve.
 

"Espèces"
Le mot "espèce" est issu du latin classique "species" et désignait le "regard", "l'aspect" donc, l'apparence. Mais "species" est également la racine du mot "épice".
Au XIIe siècle, par l'intermédiaire des croisades, l'Occident découvrit les épices que l'on utilisait dans la cuisine du Moyen-Orient. C'est Aliénor d'Aquitaine qui, séduite par les goûts que les épices conféraient aux mets de ces contrées, en introduit l'usage en France. Entre autres, le sucre (considéré comme une épice), la cannelle et principalement le poivre étaient extrêmement onéreux et réservés à une catégorie de gens fortunés. Denrées rares et précieuses, les épices servaient donc fréquemment de monnaie d'échange.
C'est vers la fin du XVe siècle, que le mot "espèce" prit en français le sens de pièce d'or ou d'argent.
Notons qu'au XVIIe siècle, selon la région où l'on vivait "payer en espèces" signifiait payer par tout autre moyen qu'en argent.

En espèces "sonnantes et trébuchantes"

Couronne d'or 1340 Philippe VI 1328 1350Cette expression tire son origine et prend tout son sens à partir d'une autre expression qui l'a précédée : "Le bon aloi", expression certifiée dès le XIIIe siècle.
Le bon aloi correspondait au titre légal d’or et d’argent que contenait la monnaie. "L’aloi" vient du verbe "allier", dont la forme ancienne était "aloyer".
Lorsqu'un roi voulait frapper des quantités de pièces de monnaie tout en n'y mettant pas une fortune en métaux précieux, il lui étaitEcu d'or Louis XII 1498 1514 facile de fausser les proportions et ainsi, de mettre en circulation des pièces de mauvais aloi (ou mauvais alliage) ne respectant pas la teneur d'argent ou d'or normalement prévue.
Pour vérifier leur aloi, les pièces de monnaie, lors de leur échange ou de leur dépôt, étaient donc soumises à deux épreuves :
- La première en faisant résonner les pièces sur une surface dure – plus une pièce sonnait et plus elle était pure. La pièce de monnaie était qualifiée de "sonnante" lorsqu'elle ne contenait pas de vil métal : pour une oreille avertie elle tintait de façon reconnaissable. Cette méthode empirique sera complétée un peu plus tard avec l'apparition d'une autre méthode : l'épreuve du "trébuchet".
1/ 4 d'écu d'argent 1643 Louis XIIIEn effet, les pièces de monnaie s'usaient pendant leur durée de vie et parfois certaines gens peu honnêtes grattaient les pièces pour en récupérer un peu de poudre d'or. Pour que la pièce ait le même poids moyen pendant toute sa durée d'usage, on lui donnait une surcharge à sa fabrication (frappe), surcharge qu'elle perdait peu à peu au cours de son passage de main en main. Cette surcharge était mesurable avec un "trébuchet". Le trébuchet, apparu au XIVème siècle, était une petite balance à plateaux servant pour la pesée de petits poids d'or, d'argent ou des bijoux. 
Une fois déclarée "sonnante", on vérifiait donc ensuite si cette espèceLouis d'or aux 4 L 1694 Louis XIV était également trébuchante, c’est-à-dire si elle avait encore le "trébuchant".
C'est donc l'usage combiné de ces deux méthodes qui donna jour à l'expression "espèces sonnantes et trébuchantes" désignant des pièces authentiques, neuves ou presque.

Autrefois, on parlait aussi de personnes de bon ou de mauvais aloi suivant qu'elles étaient de condition sociale élevée ou basse, respectivement.Ecu en argent de 6 et 3 livres Louis XVI
Au fil du temps et loin des "espèces sonnantes et trébuchantes", "aloi" est resté jusqu'à nos jours synonyme de "qualité" ou "d'authenticité.

 

"Faire le pied de grue"

Par Le 25/09/2014

Connaissiez-vous l'origine de l'expression "Faire le pied de grue" ?

Grue couronnée

À l'instar de ces grands oiseaux des marais qui parfois s'endorment en levant une patte tout en reposant sur l'autre, la grue est le surnom que l'on donne depuis 1415 aux dames faisant commerce de leurs charmes, adossées à un mur, un pied au sol et l'autre appuyé au mur et qui attendent le client.

Au XVIe siècle, le verbe "gruer" signifiait "attendre", et l'on disait "faire la grue" ou "faire la jambe de grue". C'est au XVIIe siècle que l'expression a été remplacée par "faire le pied de grue".

L'oiseau passant pour être une bête stupide, la grue étant souvent le terme usité pour désigner une personne idiote, "faire le pied de grue" équivaut donc à "attendre en ayant l'air un peu stupide".

Photo du film

"À tire larigot"

Par Le 22/09/2014

Connaissiez-vous l'origine de l'expression "À tire-larigot" ?

Grandes orgues de la cathe drale de parisDans le français populaire du XVe siècle, "tirer" ou "à tire" signifiait faire sortir un liquide pour le boire "sans arrêt, d'un seul coup" ("Quand le vin est tiré, il faut le boire"), et il existe un verbe analogue au verbe boire : "flûter".
L'expression "à tire-larigot" qui signifie "excessivement" viendrait-elle d'un amalgame avec l'ancienne expression "flûter pour un bourgeois" (la flûte à champagne n'est apparue que dans le courant des années 1930) et qui voulait dire "boire comme un trou" ? Aurait-on comparé une flûte à une bouteille ?Pieter brueghel l ancien le repas de noce vers 1568

Le "larigot", à l'origine, était une sorte de flûte, un petit flageolet dont le nom en sa forme primitive était "arigot" ou "harigot" ; au cours du temps, l'arigot a donné "larigot" par contraction de l'article et du nom.
Le "larigot" dit "jeu de larigot" est également l'un des jeux les plus aigus de l'orgue français ; il produit un son similaire à celui de la flûte.

Tuyaux d orgueMais de la flûte à l'orgue, il y a une cloche.

Une vieille histoire raconte qu'à Rouen, au XIIIe siècle, dans le clocher de la cathédrale se trouvait une très lourde cloche nommée "La Rigaud" ou "La Rigaude" ainsi nommée parce qu'offerte à la ville par l'archevêque Eude Rigaud. En raison de ses dix tonnes, elle était extrêmement difficile à mettre en branle et à faire sonner : l'effort à fournir sur les cordes était tellement intense, que les sonneurs très vite assoiffés buvaient souvent et beaucoup, pour se donner des forces ; d'où l'expression "Boire à tire la Rigaud" (connue également sous la forme "Boire comme un sonneur").

N.B. L’orgue est le plus ancien instrument à clavier de l'histoire ; c’est donc pour l'orgue et grâce à l'orgue que le clavier a été inventé. C'est au cours du IIIe siècle avant notre ère, à Alexandrie, que l’ingénieur Ctésibios met au point le premier orgue nommé "hydraule", à la faveur de ses recherches sur l’élasticité de l’air.
Chaque tuyau dispose d’une petite tirette rappelée par un ressort qui permet de faire entrer l’air et produire le son.
La La cloche est l'un des plus vieux instruments sonores que nous connaissions : elle est née probablement, quant à son principe, à l'époque où l'homme sut, par le feu, durcir l'argile et constituer ainsi un vase qui se révélera "sonore" en le percutant. Les premières cloches métalliques remontent à l'âge du bronze. On a trouvé des traces d'utilisation des cloches en Chine, il y a 4 000 ans.

La plus vieille cloche de France classée monument historique est celle de Sidiailles (Berry). Elle date de 1239.

 

"Lune de miel"

Par Le 18/09/2014

Connaissiez-vous l'origine de l'expression "Lune de miel" ?
 
Grèce
 
De nos jours, l'expression "Lune de miel" est synonyme de "voyage de noce", ou de parfaite entente entre deux personnes.
L'usage ne s'en est généralisé qu'à partir de la seconde moitié du XIXe siècle.
Dans la langue française, le terme apparaît en 1747 dans l’œuvre "Zadig" de Voltaire : "Zadig éprouva que le premier mois du mariage est la lune de miel et que le second est la lune de l’absinthe." Il semble qu'elle ait été reprise de l’anglais "honeymoon", apparu bien plus tôt, dès 1546.
Mais pourquoi cette référence au miel ?
En réalité, il s’agirait d’une métaphore inspirée d’anciennes pratiques venant de tous les continents.
Le concept de "lune de miel" trouve ses origines dans la plus haute Antiquité. Il renvoyait à la période qui suivait les noces, soit un mois lunaire de 29 jours.

Rhyton achémenide en or et lapis lazuli (VIe - Ve siècle av. J.C.)- Zoroastre (entre -1400 et -1000av. J.-C.), dans le "Zend-Avesta" (oeuvre qui lui est attribuée et qui est le livre sacré des Perses), utilise l'expression "lune de miel". Elle est donc connue de toute l'Antiquité.
- À Babylone, le père de la mariée devait offrir
La Porte d'Ishtar (575 av. J.C.) -  Mésopotamie (Irak)quotidiennement à son gendre le "mead", bière à base de miel. On appelait alors ce premier mois de mariage le "mois de miel". Le calendrier à cette époque était un calendrier lunaire. Par extension, l’expression est devenue "lune de miel".
Masque funéraire de Toutankhamon (1323 av. J.-C.) - Égypte- Les pharaons qui se mariaient buvaient également une boisson à base de miel et de propolis durant les 28 jours suivant leur mariage afin d'obtenir joie et bonheur.

- Les Chinois et les Indous consommaient du miel.

- Une ancienne tradition germanique consistait en ce que le couple ne boive que de l'hydromel pendant les trente jours suivant le mariage.

Ces substances étaient alors reconnues pour leurs vertus aphrodisiaques, favoriser la fécondité et apporter bonheur et douceur au jeune couple. 
La période suivant le mariage apparaît comme un rite de passage durant lequel il faut rompre la routine et permettre au couple de fertiliser la relation, comme une parenthèse enchantée.
Le Farvahar zoroastrien (Ahura Mazda), Persépolis - Iran

 

"En catimini"

Par Le 30/08/2014

Connaissiez-vous l'origine de l'expression "En catimini" ?

Le terme "catimini" qui signifie en "en secret, de façon discrète, en cachette" serait dérivé du grec "katamênia", "menstruation", les femmes de l'Antiquité se retirant au moment de leur état régulier. Le passage de a en i se serait fait sous l'influence du verbe catir "cacher". D'autres expressions nommant le "sang cataménial" font référence au sang lui-même.

Aphrodite sur son cygne me daillon d un kylix a fond blanc du peintre de pistoxe nos vers 460 av j c

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